Nirë était, pour changer, d’une humeur massacrante.
Elle avait marché deux heures durant dans le Bois de Glandorn, et ce n’est qu’en atteignant la lisière Est, par un pur hasard étant donné son sens de l’orientation qui laissait à désirer, qu’elle retrouva Framboise.
Celui-ci avait pris peur pour Nirë en la voyant si désespérée. Comme elle ne réagissait pas à ses hennissements, il était partit de son plus beau galop vers Fquiepou, contacter d’urgence le chef des Shampooing Illustre, le père de Nirë.
Il était à mi-chemin, lorsque Nirë l’avait rappelé à elle. Même en y mettant toutes ses forces, il n’avait pas pu être la plus tôt.
Nirë soupira. A quoi bon expliquer à ce fidèle compagnon que prévenir son père, le « sage » Pa’tappon, n’aurait servi à rien ? Tout ce qu’il aurait fait, c’est la rappeler près de lui, et la soigner au Shampooing et aux Framboises.
Nirë réalisa qu’elle était injuste. Elle n’était pas totalement seule en terre de Fangh.
Framboise avait toujours été là, à ses côtés. Silencieux. Noble.
Elle lui caressa doucement le poitrail. Chez les elfes sylvain, il était de tradition de recevoir un cheval pour son dixième anniversaire.
L’elfe était alors conduit dans un grand champ où évoluaient des poneys, avec un sac de pain à la main.
Celui qui s’approchait le plus vite pour avoir à manger était le futur poney du jeune elfe.
Le jour de ses 10 ans, Nirë était furieuse. Elle ne voulait pas participer à ce rituel bidon.
Ses parents l’avait conduite de force dans le champ, et avait posé le sac de pain à coté d’elle.
Une magnifique jument Alezan, à la crinière blonde, avait aussitôt accouru.
Nirë s’était enfuie, terrifiée à l’idée de lier son destin à un animal qui ne s’intéressait à elle que pour quelques miettes de pain. En effet, il s’agissait d’un véritable « pacte » : on ne change pas de cheval, chez les elfes sylvain. Même si maintenant, les traditions se perdent et cavalier et monture ne sont plus vraiment en symbiose….
Alors qu’elle fuyait, Nirë avait fini par tomber contre le tronc d’un arbre. Elle était restée là, à attendre, se demandant si on la retrouverait avec un détachement tout à fait inhabituel pour son age.
Un magnifique poney noir était arrivé.
Ils ne s’était rien dit, bien que leurs pouvoirs respectifs le permettent. Nirë avait regardé ses grands yeux, sa tache en forme de framboise, puis avait sourit et était montée sur son dos.
Au début, ses parents avaient protesté, mais inutilement. De plus, Framboise faisait parti de la plus noble race équine, ils n’avaient donc pas vraiment refusé cette union.
Et depuis maintenant 153 ans (c’est une jeunette Nirë), leur osmose était totale.
En ce remémorant cette rencontre, Nirë pénétra dans les marécages de l’éternelle agonie. Songeuse, elle se promenait à un petit trot régulier, lorsqu’elle entendit les bruits d’une lutte non loin. D’après son ouie, plutôt développée, elle allait droit vers le lieu du combat. Elle conserva son allure, et ses yeux perçants aperçurent peu après deux formes qui se battaient.
L’une, dont la largeur était placée horizontalement, agitait maladroitement une hache dans tous les sens.
Quand à l’autre créature… elle était avachie, sans doute gravement blessée, et Nirë n’arrivait pas à distinguer de qu’elle race elle provenait. Nirë la vit planter une dague dans ce qui semblait être le ventre du Nain, puis retomber sur le sol.
Nirë haussa les épaules. La vie ou la mort des autres ne la concernait pas.
C’est alors qu’elle vit un arc, tombé à quelques mètres du combat. Et l’arc commençait à briller, ce qui ne pouvait signifier qu’une chose. C’était un arc des Shampooing Illustre, et il réagissait à l’approche de Nirë [avant, les elfes se tiraient toujours dessus dans un même clan, parce qu’il ne se reconnaissait pas entre eux. C’est pourquoi ils ont inventé ce stratagème…qui fait que lorsque des elfes d’un même clan combattent ensembles, leurs arcs brillent et donne leur position à leurs ennemis…]
Un Shampooing Illustre ! Si loin de Fquiepou ?
Nirë enfonça très légèrement ses talons dans les flancs de Framboise, et pris un petit galop.
Sauvez l’elfe qui était en train de se faire attaquer ne l’intéressait pas. Elle ne ressentait aucune amitié particulière pour ceux de son clan. Tout ce qu’elle convoitait, c’était l’arc. C’était certainement un excellent arc, comme seuls les elfes savent le faire…
Elle fonça donc droit vers l’arc, se baissant d’un coté, prête à le ramasser sans descendre et sans même ralentir [risqué le truc, la dernière fois que j’ai vu quelqu’un tenter quelque chose dans le genre, ça s’est mal terminé]
En passant, elle jeta un regard au combat. Framboise s’arrêta alors sur le coup, démontrant encore sa capacité à deviner les pensées de sa cavalière.
L’arc posé sur le sol était le seul arc marqué du blason des Shampooing Illustre n’appartenant pas à un membre du clan. Et bien entendu, l’elfe sur le sol, gravement blessée, n’était autre que Loréliane.
A cet instant, Nirë perdit tout contrôle. Elle arma son arc, et envoya une dizaine de flèches, qui se plantèrent toutes autour du nain, en un cercle parfait.
- Désolée si cette entrée en matière est bien peu courtoise, mais je crois que c’est quelqu’un que j’apprécie que tu es en train de frapper. Tu vois pourtant bien qu’elle n’est pas en état.
Je te défie à la loyale, Etre de la Montagne. Viens et frappe le premier
Juste après avoir prononcé ces paroles, Nirë se demanda pourquoi elle avait prétendu que Loréliane était quelqu’un qu’elle appréciait. Elle n’appréciait personne hormis Framboise…